La Cour des comptes fustige le pass Culture

Écrit par Jean-Baptiste Leon

Qu’il s’agisse du budget qu’il dévore ou des activités qu’il finance, ce dispositif doit être réformé sans attendre, conseille la Cour des comptes dans un rapport publié le 17 décembre 2024.

Une partie des adolescents qui participent aux « escape games », jeux consistant à s'évader d'une pièce dans laquelle on se retrouve enfermé en moins de 60 minutes, n’ont pas cassé leur tirelire pour s’offrir une partie : c’est le contribuable qui a payé leur ticket d’entrée.

D’après un rapport de la Cour des comptes dressant le bilan du pass Culture, dispositif lancé par Emmanuel Macron en 2017 afin de promouvoir la culture chez les jeunes, plus de 16 millions d’euros ont été « indûment dépensés » en jeux de société alors qu’ils n’auraient « jamais dû être considérés comme pouvant entrer dans le périmètre des offres éligibles sur l’application ».

Le pass permet aux élèves de bénéficier d’un crédit individuel afin d’accéder à des activités ou à des biens culturels et artistiques.

La Cour des comptes demande à l’État de stopper la dérive budgétaire allouée au dispositif.

Car, au fil du temps, le coût du pass est passé de Lilliput à Brobdingnag, le pays des géants.

Pass Culture : son coût a bondi de 92 millions à 244 millions d’euros

Sa dotation a bondi de 92 millions (2021) à 244 millions d’euros (2024).

Ce n’est pas tout : si on ajoute le financement dédié à la mise en place de « projets » par classe dans les établissements scolaires, l’addition du pass monte à 324 millions d’euros par an.

Dans un premier temps, les magistrats financiers suggèrent de baisser les subsides alloués aux jeunes âgés de 18 ans de 300 euros à 200 euros, ce qui permettrait de réaliser entre 30 et 40 millions d’euros sur 24 mois.

La Cour recommande ensuite de recalibrer le dispositif. Même si la pompe d’arrosage du pass concerne 84 % des adolescents de 18 ans, il a loupé sa vocation initiale : toucher les jeunes les plus éloignés de l’offre culturelle.

Par exemple, parmi les adolescents dont les parents sont ouvriers ou employés, seuls 68 % ont activé leur Pass. « Le principal impact du Pass Culture (…) se traduit par une intensification des pratiques culturelles déjà bien établies », constatent les magistrats financiers.

En clair, le dispositif profite surtout aux enfants issus des classes moyennes. Il concerne peu le bas du spectre social.

Exactement l’inverse du but recherché initialement !

Rétroactivement, le pass est un phénomène de prestidigitation financière.

Lors de son lancement, le ministère de la Culture avait annoncé que les entreprises privées verseraient leur écot pour financer ce dispositif. Au final, le pass consomme essentiellement de l’argent public.

La gestion du dispositif fait également l’objet de remarques. La Cour préconise de transformer la société privée qui le gère (SAS pass Culture) en opérateur d’État afin que le ministère de la Culture renforce son pilotage, et fixe un « plafond d’emplois » au sein de la SAS.

Celle-ci représentait 176 équivalents temps plein (ETP) en 2024.

En 2019, la rémunération de certains dirigeants de la SAS, dont celle de Damien Cuier, son président (170 000 euros par an), avait notamment défrayé la chronique.

Publié le mercredi, 18 décembre 2024

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