Réserve parlementaire : des députés veulent restaurer ce symbole du clientélisme

Écrit par Fabrice Durtal
Députés-Réserve-parlementaire © Shutterstock

Une centaine de députés souhaitent rétablir l’usage de la réserve parlementaire, supprimée en 2017, et qui permettait aux élus de distribuer plus de 135 millions d'euros par an dans leur circonscription.

 

Chassez les mauvaises habitudes, elles reviennent au galop. Une centaine de députés viennent de signer un texte demandant le rétablissement de la « réserve parlementaire ».

Parmi eux, André Villiers (Horizons) et Dino Cinieri (Les Républicains).

La plupart des signataires proviennent de l’opposition, du Rassemblement national, de Liberté et Territoires, (LIOT) et des Républicains. Quelques parlementaires macronistes se sont associés à la démarche.

Paradoxe : certains élus opposés à son maintien soutiennent aujourd’hui cette proposition de loi comme Jean-Pierre Cubertafon, député MoDem de Dordogne.

Réserve parlementaire : le retour du clientélisme

Supprimé en 2017, notamment sous la pression de Contribuables Associés, ce dispositif opaque et favorisant le clientélisme, permettait à chaque député de disposer de 130 000 euros (260 000 euros pour les présidents de commission et 520 000 euros pour les présidents des Chambres), un trésor de guerre distribuable en toute partialité afin de subventionner des associations ou des communes si affinités électives.

L’Assemblée nationale a définitivement supprimé cette enveloppe annuelle de plus de 135 millions d’euros, répartie entre sénateurs et députés.

Les mêmes sommes servent désormais à alimenter un fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) et une dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR).

Contrairement à la réserve parlementaire, pilotée par les élus, ces structures sont placées sous l'autorité du préfet. Si les services de l’État n’ont pas la légitimité de l’élection, ils ont, en revanche, une capacité d’expertise garantissant plus d’objectivité.

Même si ce nouveau mécanisme est perfectible, il présente l’avantage de limiter les dérives dans l’attribution des fonds.

Voire pire : en mars 2017, Contribuables Associés a révélé l’un des plus gros scandales liés à ce dispositif en piégeant un assistant parlementaire, qui démarchait des associations en leur proposant des subventions de la réserve parlementaire, en échange d’une commission roborative !

Fin 2014, la Cour des comptes s’est penchée sur la réserve en dénonçant d’inévitables dérives clientélistes.

Sur la base des sommes allouées entre 2006 et 2012 (environ 1 milliard d'euros distribués via 60.000 subventions), elle notait que loin de soutenir les collectivités déstabilisées par des circonstances exceptionnelles, un bon tiers des fonds avait été investi pour des dépenses courantes comme des travaux publics.

La Cour des comptes brocardait également l'usage accru de la réserve parlementaire à l'approche des échéances électorales.

Par exemple, en 2006, un an avant les élections législatives et présidentielle, millésime durant lequel le volume des dépenses s’est emballé.

La Cour des comptes relevait aussi qu'environ 40% des dossiers de subventions accordés n'auraient pas dû être acceptés, soit pour des vices de procédure, soit parce qu'ils ne respectaient pas l'esprit d'usage de la réserve, le financement de projets locaux.

Réserve parlementaire : des députés dénoncent le retour de cette hérésie

Des parlementaires ont également dénoncé l’existence de cette réserve.

L’écologiste Isabelle Attard soulignait notamment que cette distribution d’argent public n’entre pas dans les missions d’un parlementaire.

A droite, certains parlementaires comme Nicolas Dupont-Aignan, député de l’Essonne sont également montés au créneau pour dénoncer cette machine à pots de vin.

En 2013, dans une chronique accordée au Huffington post, le président de Debout la France dénonçait la réserve comme le symbole d'un clientélisme inacceptable, en notant que certains parlementaires l’ont utilisée pour s'attacher des voix en octroyant des subventions à des associations ou aux collectivités qui rendraient les câlins.

Le député de l’Essonne soulignait aussi que la réserve a été un moyen pour l'exécutif et la majorité, de droite comme de gauche, de « tenir » les parlementaires quand il s’agissait de soutenir des projets de loi qui avaient du mal à passer.

Publié le mardi, 21 mars 2023

4 Commentaires

  • Lien vers le commentaire bourdiga mardi, 28 mars 2023 Posté par bourdiga

    touche pas à mon grisbi ! je crois qu'il existe l'équivalent au sénat et là personne dénonce

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  • Lien vers le commentaire Philippe Stocker dimanche, 26 mars 2023 Posté par Philippe Stocker

    Isabelle Attard est une député intègre.
    Bravo.
    Il faut que cesse la France des valises.

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  • Lien vers le commentaire badoul mercredi, 22 mars 2023 Posté par badoul

    Réserve parlementaire, le droit de corrompre !

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  • Lien vers le commentaire MostDope mercredi, 22 mars 2023 Posté par MostDope

    Étrange d'utiliser une photo représentant des députés socialistes pour illustrer votre article alors même qu'aucun d'entre eux n'est signataire de la proposition de loi que vous dénoncez...

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