Rénovation du Palais de justice de Paris : l’État, ce mauvais contremaître

Écrit par Fabrice Durtal
palais justice paris © dvlcom - www.dvlcom.co.uk /Shutterstock

Tatillonnes, les normes imposées par l’Inspection du travail et l’imprévoyance de l’Etat font encore déraper la rénovation de l’ancien Palais de justice de plusieurs millions d’euros.

Souhaitable, puisque ce bâtiment abrite notamment la Sainte-Chapelle que Saint Louis fit édifier afin d’abriter la Sainte Couronne d’épines, la rénovation de l’ancien Palais de justice situé sur l’Ile de la Cité est en train de virer à la gabegie financière.

Selon les informations du magazine Challenges, la facture du chantier de rénovation de ce vaste bâtiment construit entre le XIIIe et le XIVe siècle était initialement estimée à 64 millions d’euros.

Elle vient de déraper de près de 4 millions supplémentaires pour se conformer à « la nouvelle doctrine de l’inspection du travail », selon les mots de l’Agence publique pour l’immobilier de la Justice (APIJ), organisme dépendant du ministère de la Justice et qui finance ces travaux avec de l’argent public.

Cette « nouvelle doctrine » serait notamment plus à cheval sur les normes concernant le plomb et des risques de contamination encourus par les ouvriers présents sur le chantier.

Ces normes anti-plomb tournent parfois à l’ubuesque : les ouvriers ont, rapporte Challenges, par exemple interdiction de se toucher le visage sur le chantier pour éviter que du plomb s’insère dans leurs voies respiratoires.

Idem, de crainte que la fumée d’une cigarette se gorge de plomb, il est interdit de fumer sur le chantier. Les ouvriers qui sortent pour en griller une, sont censés se doucher avant de se remettre au boulot…

Combien de nouveaux dérapages d’ici la fin la rénovation du Palais de justice de Paris ?

Initialement prévu pour la fin 2024, les travaux (l’autorisation de travaux au titre des monuments historiques a été délivrée en octobre 2023) pourraient finalement déborder sur 2025. Des études architecturales pour la valorisation de la cour de la Sainte-Chapelle démarreront en 2024. L’État sera vraisemblablement obligé de remettre au pot pour boucler le chantier.

Ce gaspillage d’argent public, lié à un manque de vision d’ensemble, avait pourtant été pointé du doigt par l’Agence publique pour l’immobilier de la Justice.

Dès 2021, elle redoutait « que l’absence de vision globale ne conduise à des choix malheureux et expose l’État à des dérives budgétaires (…) » en remarquant « que le montant des travaux à réaliser, qui était estimé à 140 millions d’euros en mars 2016, est aujourd’hui de 352 millions d’euros pour la rénovation d’une seule moitié du Palais ».

L’APIJ recommandait d’établir un schéma directeur global du projet de réhabilitation du Palais de l’Ile-de-la-Cité pour la période 2021-2050, un préalable permettant aussi de mieux répondre aux obligations environnementales.

L’Etat n’a pas tenu compte des recommandations de ses propres services. Résultat, c’est au contribuable de boucher les trous.

Ici et ailleurs puisque la construction d’un nouveau Palais de justice dans le nouveau quartier Clichy-Batignolles a coûté 2,3 milliards d’euros.

Effectuée dans le cadre d’un Partenariat public privé (PPP), cette opération immobilière réalisée par le groupe Bouygues, lui assurera des rentrées annuelles de 86 millions d’euros annuels jusqu’au terme du contrat… en 2045.

Publié le mardi, 11 juin 2024

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