À cela s’ajoute un argument plus politique. Les positions anti-immigrationnistes ou xénophobes s’expliquent largement par l’idée qu’on serait passé de la « préférence nationale » à la « préférence étrangère » en matière de prescriptions médicales, d’attribution de logements, d’aide aux associations ou de dépenses concernant l’éducation ou la politique de la ville. Qui n’a pas entendu ce leitmotiv : « Ils ont tous les droits » alors que « nous qui travaillons, devons payer pour eux » ?
Si les migrants contribuaient financièrement, ne serait-ce qu’en partie, aux efforts que la communauté nationale consent pour eux, ce slogan perdrait beaucoup de sa force.
C’était, par exemple, le choix fait pour les bénéficiaires de l’AME quand, sous l’impulsion de Claude Goasguen et sous l’ère Sarkozy, il leur avait été demandé une contribution de 30 euros.
À l’époque, sur 224.000 migrants en situation irrégulière ayant eu recours annuellement à l’aide médicale, cette participation ne représentait que 6,7 millions d’euros, à peine 1% du coût de l’AME.
C’était encore trop pour la fraction idéologique de la gauche qui, dès son arrivée au pouvoir, s’est empressée de supprimer cette cotisation, accréditant l’idée que la médecine était gratuite pour les migrants irréguliers et payante pour les autochtones, un argument dont s’est emparée l’extrême droite et qui maintenant est partagé par 61% des Français.
Si la participation forfaitaire à l’AME était rétablie, outre la possibilité d’enregistrer ceux qui y ont recours, de traquer les fraudes et en même temps de pratiquer un suivi médical des populations, une cotisation de 50 euros, prélevée à la première consultation en échange d’une carte, aurait rapporté pour les 263.962 utilisateurs de l’année 2013 plus de 13 millions d’euros. En revanche, elle n’aurait pas d’effet dissuasif car la très grande majorité des utilisateurs de l’AME en font usage parce qu’ils en ont besoin.
Autre exemple. Plus de 80% des recours à l’OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides) et à la CNDA (Cour nationale du droit d’asile) sont rejetés. Or, si l’on cumule le coût d’hébergement des actuels déboutés qui restent en toute illégalité dans les CADA (centres d’accueil de demandeurs d’asile), soit 7,59 millions d’euros, et celui des futurs déboutés hébergés en CADA, ou percevant une allocation temporaire d’attente (ATA) soit 109,36 millions d’euros, on atteint une somme de 116,95 millions d’euros qui pourrait être en partie économisée.
Supposons que toute personne déboutée en première instance soit appelée à verser une caution de 200 euros, laquelle lui serait remboursée si la décision est favorable. Le tableau en Annexe 2 montre que la somme ainsi versée aurait représenté, en 2014, 7,47 millions d’euros dont 1,17 seraient rendus aux bénéficiaires d’une décision positive, soit une économie pour l’État de 6,3 millions d’euros par an. Somme dérisoire sur le plan financier. Mais pas sur le plan politique car cela montrerait que les migrants contribuent, ne serait-ce que symboliquement, aux frais engagés pour eux.
De plus cette contribution dissuaderait sans doute un certain nombre d’entre eux de faire appel à des instances juridiques dont le fonctionnement est très coûteux, raccourcirait la durée entre l’appel et la décision finale, donc les frais de fonctionnement des CADA pour les futurs déboutés, libérant ainsi des places pour les autres demandeurs d’asile dont certains dorment dans la rue.
Selon notre estimation de 2011, le surcoût généré par les recours devant la CNDA (186,78 millions d’euros) auquel il faut ajouter les recours devant les tribunaux administratifs chargés de juger les contentieux (61,67 millions d’euros), l’aide juridictionnelle (5,6 millions d’euros) et la part de la justice pénale consacrée aux contentieux concernant les migrations irrégulières (15,73 millions d’euros), représentait un montant de 269,78 millions d’euros.
Imaginons simplement que 20% d’entre eux y renoncent. L’économie serait d’environ 54 millions d’euros qui s’ajouteraient aux 6,3 millions évoqués plus haut. Et cela contribuerait sans doute à pacifier le climat entourant la question des migrants
Jean-Paul Gourévitch, consultant international sur l’Afrique et les migrations
Article extrait de « Les migrations méditerranéennes en 2015. Chiffres et coûts, les réalités du présent, les scénarios du futur » par Jean-Paul Gourévitch. Étude n°34 de Contribuables Associés. À télécharger gratuitement sur notre boutique en ligne
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