Plus la date d’entrée en vigueur du prélèvement à la source approche et plus ses dangers apparaissent au grand jour.
Les associations qui vivent de la générosité publique ainsi que les établissements spécialisés dans la défiscalisation ont même commencé à tirer la sonnette d’alarme.
En effet, la complexité du texte avait caché un élément essentiel pour le portefeuille des contribuables habitués à défiscaliser : le taux du prélèvement à la source dépend non pas de l’impôt payé les deux années précédentes mais des seuls revenus de ces mêmes années.
Le prélèvement se calculera donc sans tenir compte des réductions, crédits d’impôt et déduction fiscale. Ce qui est tout à fait différent de ce qui existe actuellement où les acomptes sont déterminés à partir de l’impôt de l’année passée, dispensant ainsi de paiement ceux qui ont défiscalisé.
Cela signifie donc que le contribuable qui avait pris l’habitude de ne plus payer d’impôt et même pas d’acompte du fait de la défiscalisation, devra désormais en payer sur la base de ses revenus, quitte à se faire rembourser par la suite.
Ce qui n’est pas du tout la même chose. S’il doit désormais payer tous les mois son prélèvement avant d’être remboursé, le contribuable risque en effet de se lasser et de trouver que sa défiscalisation ne lui sert à rien puisqu’il doit continuer de payer.
Prélèvement à la source : un impact très négatif sur la trésorerie des contribuables
En pratique, le contribuable commencera par payer en 2019 (don, investissement Pinel, PME…) pour avoir le droit de défiscaliser ses revenus 2019, réglera en même temps son prélèvement mensuel sur la base de ses revenus 2017 et 2018 et obtiendra seulement un remboursement en septembre 2020, tout en continuant de payer son prélèvement en parallèle.
Ce qui aura incontestablement un impact très négatif sur sa trésorerie, ou au moins sur l’idée qu’il s’en fait. Surtout s’il poursuit les opérations de défiscalisation en 2020 pour se faire rembourser en 2021 un impôt déjà acquitté…
En clair, le contribuable aura toujours une année de retard et le fisc une année d’avance, ce qui risque d’en dissuader bon nombre de continuer à défiscaliser.
Perdants : les propriétaires immobiliers, les travailleurs indépendants, les particuliers-employeurs
Et les mauvaises nouvelles s’accumulent car les propriétaires immobiliers viennent par exemple de comprendre qu’ils devront payer pour leur part, dès janvier, des acomptes sur les loyers qu’ils perçoivent. Et ce, même s’ils sont non imposables puisqu’ils devront quoi qu’il arrive payer immédiatement 17,2 % de prélèvements sociaux, au lieu d’attendre l’année suivante comme actuellement.
Et ils ne sont pas les seuls perdants car les travailleurs indépendants, pourtant souvent déjà à court de trésorerie pour payer leurs cotisations sociales, devront aussi s’acquitter eux-mêmes de leur impôt dès janvier.
Sans oublier les particuliers-employeurs qui devront gérer le prélèvement de leur employé ou se faire eux-mêmes prélever par le CESU.
Quant au choix offert au contribuable de modifier son taux si sa situation financière change, elle s’avère un leurre. D’abord parce que le contribuable ne peut pas anticiper ce changement mais doit attendre le début de l’année pour solliciter un changement de taux et se trouve donc soumis à la diligence du fisc.
Mais aussi et surtout parce qu’il devra auparavant déclarer par anticipation ses revenus de l’année passée…
Le ministère des Finances pratique la cavalerie financière
Tout est donc fait pour dissuader le contribuable de coller le prélèvement sur ses revenus actuels, contrairement au discours officiel.
Seul compte une rentrée rapide d’argent pour le Trésor, quelle que soit la réalité de sa créance. En termes simples, il s’agit de cavalerie financière.
Et pour clore le tout, la dernière campagne de déclaration de revenus a révélé que seuls ceux qui payaient en ligne pouvait modifier leur taux de prélèvement.
Le prélèvement à la source se révèle donc avant tout une grande victoire pour l’État et sa trésorerie qui gagne un an dans bien des cas, et une duperie pour le contribuable qui doit remplir une déclaration toujours aussi compliquée et a de plus en plus la désagréable impression qu’il ne consent plus vraiment à l’impôt.
Olivier Bertaux, expert fiscal
Contribuables Associés se bat depuis plus de deux ans contre le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.
Avec Contribuables Associés, luttez pour la réduction des dépenses publiques, car trop de dépenses publiques c'est trop d'impôts, et contre les gaspillages scandaleux d'argent public !