La dernière loi de finances annonce en catimini la réforme des évaluations foncières pour le calcul des impôts locaux des ménages. Le processus de mise à plat du calcul de la taxe foncière et de la taxe d’habitation est enclenché, consistant à réévaluer l’ensemble des logements de France et de Navarre pour leur appliquer les impôts qui correspondraient à leur valeur réelle.
L’idée de cette réforme peut sembler pertinente mais le projet soulève certaines interrogations.
Tout d’abord, rappelons qu’un chantier similaire existe depuis 3 ans pour la réévaluation des locaux professionnels, censé aboutir en 2015 à des assiettes toutes neuves pour le calcul de la contribution foncière des entreprises. Or, les premières analyses laissent entrevoir, si aucune correction n’est apportée, des augmentations pouvant aller jusqu’à 300 % ou 500 % !
Ensuite, la nouvelle valeur fiscale des logements proviendra de l’application à la consistance du local d’un tarif au mètre carré. Autrement dit, la valeur sera proportionnelle à la surface et calculée en fonction d’une grille tarifaire établie selon le marché locatif local, pondérée le cas échéant de l’état du bien. La valeur dépendra donc d’éléments souvent subjectifs ou imprécis, voire invérifiables. Rappelons à ce sujet que les informations seront avant tout fournies par le contribuable lui-même, selon une déclaration à remplir, sous peine d’une amende maximale de… 150 € !
Une première réaction à la lecture du projet est donc de se dire que l’on quitte une évaluation obsolète pour une estimation fantaisiste…
Quoi qu’il en soit, le dossier est à surveiller de très près car la révolution des évaluations foncières doit s’effectuer à rendement constant. S’il y a de gros gagnants, il y aura donc forcément de gros perdants. Vouloir rapprocher les impôts locaux de la valeur réelle des biens est à double tranchant. La réévaluation des immeubles haussmanniens, actuellement classés comme vétustes car inscrits au cadastre avec leur confort du XIXème siècle, part d’un bon sentiment mais peut conduire à une explosion de leurs taxes. Or, il n’est pas certain que l’occupant d’un appartement évalué 600 000 € accepte facilement de payer une taxe d’habitation au taux symbolique de 0,5%, comme on l’entend parfois, soit 3 000 €… D’autant que si les évaluations retenues dans les zones défavorisées sont en échange revues à la baisse, les collectivités chercheront alors à compenser la perte en agissant sur le seul levier à leur disposition : Le taux des taxes ! Car si on peut douter qu’un élu baisse ses taux quand ses assiettes augmentent, on peut être certain qu’il les augmentera si ses assiettes diminuent.
Bref, l’expérimentation qui va commencer en 2015, notamment dans les cinq départements servant de cobayes, sera à suivre à la loupe.
L’application étant prévue pour 2018, profitons-en pour réfléchir à une taxe locale assise sur autre chose que la valeur des immeubles dont on voit vite la limite…
Olivier Bertaux, expert fiscaliste de Contribuables Associés
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