La France trop coulante avec la fraude sociale

Écrit par Fabrice Durtal
Fraude sociale-assurance maladie-impunité © Fotolia

Atteinte au principe de solidarité et d’un coût financier élevé, la fraude sociale vient de faire l’objet d’une nouvelle estimation par la Cour des comptes. Vertigineux.

 

Alors que les détails du plan de lutte contre la fraude sociale ont été présentés ce matin par Gabriel Attal, ministre chargé des Comptes publics (nous y reviendrons dans la journée), la Cour des comptes a dévoilé le 24 mai dernier les conclusions d’un rapport quantifiant cette gabegie budgétaire.

Facturation exagérée ou fictive, fausses cartes Vitale, pensions de retraite versée à des allocataires décédés, etc. : les magistrats de la rue Cambon estiment que la fraude aux prestations sociales sous toutes ses formes représente entre 6 et 8 milliards par an.

Du propre aveu de la juridiction, cette évaluation ne tient pas compte des « erreurs fautives », celles dont l’intention frauduleuse n’a pas pu être établie.

Si on intègre ces « erreurs fautives », la fraude pourrait dépasser 15 milliards d’euros par an.

Cette estimation est très en deçà de celle du magistrat Charles Prats, spécialiste du sujet, qui l’évalue à près de 40 milliards d’euros par an.

En 2024, la Sécu dévoilera sa première « estimation globale » des montants détournés.

Connue pour ses appels répétés à la maîtrise des dépenses publiques, la Cour des comptes déplore le peu d'agents affectés à la lutte contre les malversations.

Le personnel dédié aux contrôles plafonne à 3 400 agents (Assurance maladie, CAF, etc). C’est notoirement insuffisant face aux 600 milliards d’euros distribués chaque année par les organismes sociaux.

L'assurance maladie concentre une grande partie de la fraude. Elle représente environ 4 milliards d'euros par an.

La Cour estime que 80% des abus sont le fait de professionnels : médecins obtenant le remboursement d’actes fictifs, infirmiers déclarant des actes incompatibles entre eux, kinésithérapeutes ou ambulanciers déclarant des trajets fantômes, etc.

Fraude sociale : l'impunité permanente

La Cour regrette que l'assurance maladie ne contrôle que de 1 à 4% des factures émises par ces différentes professions.

Et demande moins de laxisme : depuis la crise sanitaire, aucun contrôle n'a, par exemple, été effectué sur les factures émises par les établissements de santé, alertent les magistrats financiers.

On estime que les tricheries détectées par la CAF se situent autour de 11%, moins de 1% pour la Complémentaire santé solidaire.

Autre volet de la fraude, celle des allocataires qui empochent un RSA ou une prime d'activité à laquelle ils n’ont pas droit, etc.

En 2022, relève la Cour, les CAF n’ont contrôlé sur place que 3% du 1,9 million de foyers bénéficiaires du RSA.

Pour limiter la fraude de la branche "famille" en amont, les magistrats proposent que les CAF recoupent les revenus déclarés par les allocataires avec les données fournies par des tiers, par exemple, Pôle emploi ou les employeurs, afin de s’assurer de la sincérité des demandes.

Non contente de se faire escroquer, la Sécu ne cherche pas toujours à recouvrer les sommes filoutées, notamment celle des particuliers qui portent sur des montants individuels relativement réduits.

Les caisses de retraite ne puniraient que les trois quarts des tricheries et la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) a pour objectif d'en sanctionner les deux tiers.

« Il faut donc faire beaucoup, beaucoup de contrôles pour arriver à récupérer des montants fraudés », préconise la Cour des comptes.

Lorsqu’ils sont menés, ces contrôles sont productifs.

Exemple : en 2021, l'assurance vieillesse a demandé aux pensionnés algériens âgés d'au moins 80 ans de se rendre au guichet des banques locales gérant leurs prestations, pour vérifier s’ils étaient bien vivants.

Sur les 472 assurés concernés, 39 n'ont pas respecté cette obligation. Leurs paiements ont été interrompus.

Publié le mardi, 30 mai 2023

2 Commentaires

  • Lien vers le commentaire virginie jeudi, 01 juin 2023 Posté par virginie

    Alors quand on fait des demandes d'explications caf/msa et qu'on a pour réponse : c'est justifié ou que l'on envoie un copier/coller de ce que l'on a vu sur un site du gouvernement et en disant qu'on ne savait pas et que donc il y a des rectifications à faire, car les conseillers ne disent jamais la même chose pour la même question, on peut se demander qui fraude en réalité, en plus la complexité des documents avec écrit en tout petit ce qui est intéressant et que l'on ne voit donc pas et qui peut tout changer....
    j'ai constaté que réclamer aux français mais vivant en france uniquement doivent rembourser sans savoir pourquoi avec menace tribunal, mais que ceux (déjà plusieurs cas) de personnes fraudeurs vivant ailleurs ne remboursent pas et il ne s'agit pas de 100 euros...
    J'ai aussi le souvenir d'une ancienne collègue qui avait prévenu que son ex-mari qui ne payait pas les pensions alimentaires (enfants en france et allemagne) avait reçu un héritage de son pays d'origine (voiture décapotable) travaillait au 'black" et vivait en foyer et était plusieurs mois dans son pays d'origine, devinez qui a eu des soucis, pas l'ex-mari mais celle qui dénonçait...

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  • Lien vers le commentaire vacher eric mercredi, 31 mai 2023 Posté par vacher eric

    Ils ont la trouille ! Alors, ils ferment les yeux. Tout ça c'est du flanc. Ils préférent taper sur les contribuables dont personne ne s'inquiète et que tout le monde accable.

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