Une pétition de Contribuables Associés exige de faire toute la lumière sur l’Indemnité représentative de frais de mandats (IRFM) [les frais de mandat des parlementaires, NDLR]… qui nous font le coup de la vertu outragée !
Un tollé ! Notre pétition pour la transparence des frais de mandat des parlementaires a déclenché un véritable scandale. Les couloirs de l’Assemblée et du Sénat ont résonné des noms d’oiseaux habituels : « Populistes !», «Démagogues !» Nous avons reçu plusieurs lettres de la même farine, sur le mode : «Vous faites le lit des extrêmes». Pourquoi de telles réactions ? Parce que nous attaquons les députés ? Pas du tout. Nous voudrions seulement y voir un peu plus clair dans leurs émoluments.
Reprenons l’affaire à son début
Ce qui est en cause dans cette affaire, c’est l’IRFM. Personne ne sait ce que c’est. Cela veut dire Indemnité représentative de frais de mandat. Derrière le sigle un brin technocratique se cache la somme que touchent, chaque mois, députés et sénateurs pour faire face aux dépenses liées à leur activité de parlementaire : 5 884,91 euros pour les députés, 6 209,13 euros pour les sénateurs. En plus de leur indemnité.
Le problème n’est pas l’existence de cette somme ; il faut bien que les parlementaires entretiennent une permanence, reçoivent, envoient des fleurs, invitent des personnalités au restaurant… À condition que cela ne dépasse pas certaines limites et que cela corresponde bien à leur activité parlementaire. Toute la question est dans cette condition. Aujourd’hui, cette somme est dépensée sans aucun contrôle. Personne ne sait la façon dont elle est dépensée. On donne une somme globale à nos honorables parlementaires et ils la dépensent comme bon leur semble, sans justificatif. Au risque de faire naître les pires soupçons chez les vrais antiparlementaires.
Se souvient-on, à ce propos, du scandale qui a éclaté l’an dernier en Grande-Bretagne (1) et qui a décimé une bonne partie des parlementaires ? Pour certains d’entre eux, les notes de frais servaient à tout sauf à l’exercice de leur mandat. En France, un tel scandale est inimaginable puisqu’il n’y a pas de notes de frais. Certains députés peuvent donc s’offrir des costumes et de bons restaurants – on sait que certains le font – en toute impunité.
Autre exemple, celui des entreprises privées. Cela fait belle lurette qu’elles examinent à la loupe toutes les sources d’économies possibles, y compris et surtout dans les frais généraux. Les spécialistes de la réduction des coûts reconnaissent que pour être comprise et acceptée par les salariés, une politique d’économie doit être cohérente : « Il est encore trop fréquent de voir que, dans certaines entreprises, on diminue les frais de déplacements mais qu’en même temps le bonus du P-DG, lui, augmente. Il faut que le dirigeant soit exemplaire et incarne ce programme », déclare l’un d’eux (Les Échos, 21 octobre 2008). Comment ce raisonnement pourrait-il ne pas être appliqué à la sphère publique ?
Contribuables Associés propose donc de remplacer le système actuel, pervers et obscur, par celui des notes de frais, comme cela se fait aussi bien dans les entreprises privées qu’au Parlement britannique.
À la fin de chaque mois, le parlementaire transmettrait aux services financiers une note de frais accompagnée de tous les justificatifs des dépenses. Une dépense non justifiée au regard de l’exercice du mandat parlementaire serait rejetée par les services en question. Et les crédits non consommés par rapport au plafond seraient reversés à la trésorerie de chaque assemblée.
Cette mesure, qui ne devrait gêner que les députés peu scrupuleux, contribuerait à la politique d’économie, plus que jamais nécessaire en période de crise ; personne ne comprendrait que les parlementaires échappent à la rigueur que le gouvernement commence à appeler – timidement – de ses vœux. Loin d’alimenter l’antiparlementarisme, ce nouveau système lèverait au contraire le soupçon qui pèse sur les députés et sénateurs. Il défendrait, en bref, les parlementaires contre eux-mêmes.
Charles-Henri d’Andigné
(1) Rénovation et embellissement de leur domicile, achat de mobilier et de gadgets en tous genres, de la maison pour canards à la location de films pornographiques… La publication des notes de frais des parlementaires britanniques avait entraîné un véritable séisme politique outre-Manche, et trouvé un écho dans les médias du monde entier. Au total, une vingtaine d’élus avaient dû quitter leur poste.